Vous
vous rappelez des histoires qui font peur que nous nous
racontions quand nous étions enfants ? Le genre d'histoire qui
se passe dans un vieux château hanté reculé sur une colline battue
pour les vents incessants et l'orage ? Les Hauts de Hurlevent
rentrent définitivement dans cette catégorie d'histoire
glauque...
Il
ne manque plus qu'un cimetière pour compléter le cliché ! Eh
bien, devinez quoi ? Il y en a un dans ce roman. Dans ce cas me
diriez-vous, pourquoi s’attarder dessus ? Tout simplement car
tout le génie de Emily Brontë est là : jouer avec les clichés
pour mieux nous surprendre. Le résultat ? Sans aucun doute l'un
des romans les plus marquants qui m’ait été donné de
lire...
Les Hauts de Hurlevent, quelle histoire !
Ce
roman est avant tout une histoire d'amour et de haine :
celle d'Heathcliff un bohémien adopté par les Earnshaw, et
de Catherine dit Cathy la fille de la famille.
À
la mort de son bienfaiteur, Heathcliff est contraint de subir les
maltraitances du fils de la famille : Hinley. Ajoutez à cela une jalousie
maladive à l'égard d'Edgar Linton qui, grâce à sa culture et son
éducation, obtient les faveurs de Cathy et vous obtiendrez le départ
d'Heathcliff pour préparer sa vengeance. Une vengeance qui
pèsera sur toute la descendance des familles Earnshaw et Linton...
Un roman gothique ?
Pour
écrire les Hauts de Hurlevents, Emily Brontë s'est très largement
inspirée des grands romans gothiques comme : Les mystère d'Udolphe
d'Ann Radcliff, Le moine de Lewis ou encore Pamela de Ridcharson.
De
ses œuvres, Emily Brontë en a extrait l'engouement pour le
sentimental, le macabre et l'architecture gothique anglaise. La lande
jaunâtre est sans cesse battue par le vent, l’atmosphère y est
orageuse. Les Hauts de Hurlevent sont un vieux château des temps
jadis dressés fièrement sur une colline sauvage. Beaucoup de scènes
se passent en huis clos et quelques fantômes viennent agrémenter le
récit imprégné par une atmosphère angoissante.
Pourtant,
Les Hauts de Hurlevents ne sont pas vraiment un roman gothique.
Beaucoup le classe d'ailleurs dans le courant du romantisme qui est
(d'après Wikipédia) : « un mouvement culturel se
caractérisant par une volonté d'explorer toutes les possibilités
de l'art pour exprimer ses états d'âme : il est ainsi une
réaction du sentiment contre la raison. »
Si
j'osais m'aventurer sur ce terrain glissant, je dirais que les Hauts
de Hurlevents n'appartiennent à aucune de ses deux catégories. Ils
empruntent trop à chacun de ces deux genres pour entrer dans l'une
ou l'autre de ces cases. C'est un joyeux mélange qui fait de cette
œuvre un véritable petit bijou unique en son genre.
La mise en exergue des passions
Un roman violent...
Le
roman d'Emily Brontë est caractérisé par une omniprésence de la
violence. Les personnages souffrent... le lecteur aussi ! C'est
une histoire qui nous pousse dans nos retranchements. La violence est
partout !
Parfois
physique lorsque Cathy se fait mordre à la jambe par un chien ou
quand Heathcliff se fait fouetter par Hinley, parfois morale lorsque
Heathcliff fait du fils d'Hinley (Hareton) sa victime en le torturant
psychologiquement ou quand Cathy sous l'influence d'Heathcliff se
torture elle-même pour avoir épousé Linton... Même les
personnages moralement bon, et donc non violent, deviennent parfois
cruels, comme contaminés par l'ambiance malsaine !
Cela
amène le lecteur à se questionner sur sa propre moralité. Suis-je
comme ces personnages qui se torturent les uns les autres ? J'ai
pitié d'Heathcliff, mais il est horrible et immoral. Cela fait-il
de moi une mauvaise personne ?
Le grand 8 des émotions...
Si
Emily Brontë est douée pour remettre en question notre moralité,
c'est loin d'être son seul talent ! Sous sa plume, ses
personnages passent de l'état de victimes à celui de bourreaux
avant de sombrer peu à peu dans la folie...
Et tandis que les
personnages s'entre déchirent, Emily Brontë joue avec les émotions
de ses lecteurs. Ces revirements de situation brutaux perturbent le
lecteur qui ne sait plus ce qu'il doit ressentir. Je me suis ainsi
parfois surprise à plaindre sincèrement Heathcliff avant d'être
submergée de dégoût à son égard seulement quelques lignes plus
tard !
Une ode à la tempérance et la modération
L'animalité
d'Heathcliff / la modération de Linton
Le
roman est porté par les tempéraments enflammés de Cathy et
Heathcliff. La mise en avant de ces deux personnages, tend à faire pâlir les autres parties
prenantes du récit. Cela est sans doute encore plus vrai dans le cas
d'Heathcliff que l’obsession de la vengeance finit par consumer
totalement. Heathcliff n'est plus humain, c'est un monstre ! Son
comportement est bestial, son apparence sauvage !
L'apparence et le
comportement d'Heathcliff sont en opposition avec l'objet de sa
jalousie : Edgar Linton. Ce dernier est un gentilhomme qui
fascine Cathy par son élégance et sa culture. L'animalité et la
colère opposées à la modération et la patience. Or, Cathy pourtant
éperdument amoureuse de Heathcliff finira par épouser Linton, et à
travers lui les vertus qu'il incarne.
Certains avanceront que
ma théorie ne tient pas debout, puisque Linton décède après une
longue maladie. Heathcliff, n'obtiendrai t-il donc pas la victoire sur
Linton ?
La
passion destructrice / La tempérance d'un amour mature
Certes comme nous
venons de l'évoquer Heathcliff survit à Linton MAIS Cathy l'amour
de sa vie meure bien avant son époux en donnant naissance à sa
fille Cathy junior fruit de son mariage avec Linton.
Vous appelez ça une
victoire vous ? Et comme si cela ne suffisait pas, malgré les
efforts déployés par Heathcliff pour torturer Cathy et le fils de
Hinley son ancien bourreau la nouvelle génération finira par
s'unir. L'amour destructeur de Heathcliff et Cathy source de
souffrance et de mort s'oppose à celui plus modéré et sain de
Cathy junior et Hareton. Leur amour triomphe ainsi de la vengeance d'Heathcliff.
À travers ses deux oppositions, Emily Brontë prône les vertus de la
tempérance, de la modération et de la patience.
Les Hauts de Hurlevent prennent aux tripes !
C'est une lecture
intense qui pourrait laisser à penser que l’œuvre n'a été
conçue que dans un but expérientiel si l'on ne s'attarde pas
dessus. Quoi qu'il en soit, je vous en conseille vivement la lecture
pour vous forger votre propre opinion !
Quelle chronique ! Ce roman a vraiment l'air intense oui et profondément intéressant ! Jusqu'à présent c'est le côté glauque qui m'a freiné mais il fait définitivement partie des romans que je compte lire :)
RépondreSupprimerSort le de ta PAL le plus vite possible ;)
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